Après Strasbourg et Lille, Montpellier a pris l'initiative en avril de cette année, d’adhérer au réseau des collectivités pour l'Habitat participatif. Deux parcelles sont proposées dans une ZAC à l’ouest de la ville, HABITER C’EST CHOISIR, un autre collectif accompagné par TOITS DE CHOIX, déposera sa candidature à la fin de cette semaine pour une parcelle pouvant accueillir entre 12 et 14 logements. La décision est attendue en septembre.
 
Enfin, la Ville de Paris vient de voter un document cadre qui précise certains éléments des appels à projets à venir. Cette multiplication des initiatives des collectivités confirme la tendance : L’Habitat participatif intéresse les élus. Ils reconnaissent l’utilité publique de la démarche et ils souhaitent soutenir son développement. Cependant, chacun s'organise d’une manière différente. Nous sommes clairement dans une phase d’expérimentation et il est intéressant d’analyser les particularités des choix faits par les uns et les autres.

Les parcelles proposées

Strasbourg a sélectionné pour une deuxième fois des parcelles dans le diffus pouvant recevoir entre 2 et 13 logements. Lille propose 5 parcelles pour 4 à 15 logements dont deux dans des ZAC et une en rénovation. Montpellier a choisi 2 parcelles dans la ZAC des Grisettes, un nouveau quartier de 1500 logements sur 18 ha. Les lots peuvent accueillir entre 9 et 14 logements.

L’action de la collectivité : Lille et Strasbourg ont organisé plusieurs ateliers publics pour faire connaître l’appel à projet et informer les particuliers sur les montages et processus de ces deux projets en autopromotion. Le résultat est une réelle compétition pour les parcelles les plus attractives.

A Montpellier, la Ville s’appuie sur les associations existantes qui se mobilisent depuis un moment déjà pour l’Habitat groupé en n'organise pas d'animations particulières.
Le document parisien ne donne pas de précisions quant aux actions à mener pour favoriser l’émergence des groupes. En revanche, la Ville s’engage à mettre à la disposition des groupes des Assistants à Maîtrise d’ouvrage (AMO), proposition qui fait le lien avec le sujet suivant.

Le rôle des structures d’accompagnement

À Strasbourg, c’est l’association « Ecoquartier » qui a animé les ateliers publics avec l’aide d’une salariée. Ensuite, le Cahier des Charges (CdC) impose aux groupes sélectionnés de se faire accompagner par un AMO professionnel. Lille ne donne pas de précisions à ce sujet. Cependant, la sélection du groupe que nous avons conseillé dans une compétition avec plusieurs collectifs, montre bien l’utilité de la présence d’un AMO dès cette phase de la réflexion.

La Ville de Montpellier et son aménageur, la SERM, ont insisté dès le départ sur la présence d’un AMO, et les collectifs qui déposent un dossier complet peuvent compter sur une somme de 3000 EUR HT en tant que contribution aux frais.

Les choses sont plus complexes dans le projet parisien. La ville propose de mettre à disposition des groupes un AMO qui serait certainement choisi par un appel d’offre public. Les groupes ne peuvent donc pas choisir leur accompagnateur. Or, le lien entre AMO et collectif est très vivant, pour ne pas dire sensible. Notre intervention n’est pas que technique. Nous intervenons également dans la dynamique des groupes et nous nous adaptons constamment aux compétences et attentes en présence. Chaque groupe est différent et il doit trouver le conseil qui lui correspond. Le lien de la rémunération directe entre collectif et AMO fait partie de cette convention. Offrir, et donc imposer, un AMO aux groupes, c’est comme imposer des chaussures aux citoyens. Elles ne seront pas forcément de la bonne taille.

La gestion du temps et des processus

Strasbourg, Lille et Montpellier procèdent d’une manière assez similaire. Les groupes sont invités à préparer un dossier de candidature sur 4 à 6 mois. Le niveau du rendu est la présentation du collectif et de son projet social, un pré-programme, un montage juridique et certains éléments financiers. Sur la base de ces documents qui doivent apporter la preuve de la cohérence de la démarche et de la faisabilité, une commission sélectionne une candidature par parcelle et lance avec eux la phase des études.

Le cadre de la Ville de Paris se présente différemment. Elle demande une simple déclaration d’intention pour procéder à une première sélection. Ensuite plusieurs collectifs avancent dans le projet jusqu’à l’esquisse élaborée par les architectes. Cette phase représente entre 6 et 9 mois de travail intense et des dépenses significatives. L’AMO est toujours offert par la Ville, mais nous ne trouvons aucune précision sur le volume ou le contour de son intervention. Ensuite il faut rémunérer l’architecte (entre 10 et 15 k EUR).

A la fin de cette phase, la Ville retient 2 collectifs qui vont poursuivre les études jusqu’au APS (Avant-projet sommaire). Enfin, le meilleur groupe sera sélectionné. Les membres du groupe « perdant » auraient investi entre 12 et 15 mois de mobilisation avec des réunions très fréquentes. D’autre part, ils auront perdu certainement plusieurs milliers d’euros par foyer pour rémunérer les architectes et d’autres intervenants professionnels. Une sélection aussi tardive nous semble peu adaptée et susceptible de générer une frustration considérable chez les citoyens mobilisés. Elle représente une mise en compétition redoutable des collectifs, bien plus impitoyable que les consultations des promoteurs classiques.

Nos conclusions :

Les initiatives de Strasbourg, Lille et Montpellier déclinent avec certaines différences le sujet. Elles prennent en compte les particularités des processus de l’Habitat participatifs et proposent des phases et modalités adaptées à un contexte local. Le projet de Paris fait l’exception car il est tellement éloigné de la réalité vécue par les porteurs de projets que nous nous posons la question s’il n’y a pas une certaine incompréhension de la démarche de l’Habitat participatif par les rédacteurs de ce texte. Un bon moyen pour garantir la réussite des consultations à venir serait la mise en place d'une concertation systématique en amont avec les acteurs locaux mobilisés.

Une autre source d’information prometteuse est le réseau des collectivités pour l’Habitat participatif qui fait circuler les « bonnes pratiques » et qui partage les retours d’expériences.

Dans tous les cas, le concept des appels à projets semble en bonne voie pour devenir le moyen principal des collectivités qui souhaitent agir en faveur du développement de l’Habitat participatif.